Dans les cercles de la photographie alternative on l’appelle « cyano », un petit nom que l’on prononce toujours avec affection et une pointe d’émotion. C’est que, pour beaucoup d’artistes de la photographie alternative - y compris ceux dont les œuvres sont au musée - le cyanotype a été la porte d’entrée au monde des procédés artisanaux.
Par Jean-Baptiste Rabouan : Il faut dire que le cyanotype a pas mal d’atouts dans sa manche. Tout d’abord les produits de base utilisés ne sont pas toxiques et ce n’est pas rien lorsque l’on connaît la dangerosité des autres chimies photographiques. Ensuite, la mise en œuvre ne nécessite pas d’investir dans un matériel onéreux et enfin, la manipulation est des plus simples. Fantastique ! me direz-vous, mais alors pourquoi le cyanotype a-t-il eu si peu de succès ? Tout d’abord sa couleur bleue, très spécifique, n’était pas au goût des amateurs du XIXe et XXe siècle et puis le cyanotype se fait à la main et s’accommode mal d’une production et d’une diffusion industrielles. Mais surtout… si faire un cyanotype est relativement simple, réussir une belle épreuve est une autre affaire. Par comparaison, on pourrait dire qu’il est facile d’apprendre les trois accords de guitare mais avant de jouer du Django il y a du chemin à parcourir.
On doit l’invention du procédé en 1842 à Sir John Frederick William Herschel, 1792 – 1871, astronome et chimiste, qui mit au point le procédé en travaillant sur la sensibilité à la lumière des sels de fer. Anna Atkins, une botaniste britannique, 1799-1871, utilisa la technique du cyanotype pour ses ouvrages d’herbiers en photogrammes. Ce fut l’une des premières - sinon la première - publication d’ouvrage photographique ! Sans entrer dans le détail des « recettes », l’intérêt pour un amateur (au sens noble du terme) d’être initié au cyanotype réside dans le fait qu’avec peu de moyens et sans danger, on apprend à maîtriser l’essentiel des manipulations des procédés photographiques artisanaux dits alternatifs tels que Van Dyck, papier salé, platine et platinium, gomme pigmentée…
Après avoir préparé un négatif numérique, il faut un peu de ferricyanure de potassium, du citrate de fer, une feuille de papier et de l’eau. Après exposition à la lumière du jour, le tirage est simplement lavé et le cyanotype est fait ! C’est tout ? me direz-vous. En effet, cela peut se résumer ainsi mais les possibilités sont infinies pour obtenir certaines teintes de bleu allant du cyan au violet ou même virer l’épreuve pour des tons sépia ou gris. Car, pour le cyanotypiste, la technique occupe une petite place en regard du « tour de main », du geste, qui donnera un supplément d’âme à l’épreuve photographique. Jean-Baptiste Rabouan
Voir le livre pédagogique Cyanotype, photographie et techniques créatives.
Comments